mercredi 19 août 2015

05/12- 17/12 : Santiago – Pucon Chili

Nous voici donc prêts à quitter le Pérou et à savourer l'été en terre patagonne mais avant, nous devons descendre les 3500 kms séparant Lima de Santiago et affronter nos plus longs trajets en bus de tout notre voyage. 23 heures pour notre première étape jusqu'à Tacna d'où nous prenons un « colectivo » pour Arica (Chili) où nous arriverons 2 heures plus tard . Là, un repas à une table, une bonne douche et un vrai lit nous attendent pour une nuit de repos . Et le lendemain matin, nous repartons pour 35 heures de bus jusqu'à Santiago . Une épreuve qui se révéla plus aisée et supportable que prévue... Les sièges «  salon cama » peuvent s'allonger complètement et permettent de dormir vraiment...Grignoter, manger, regarder la télé, rêvasser en admirant le paysage, sommeiller, dormir, se dégourdir les jambes et fumer sa cigarette pendant les arrêts sont nos principales activités. La musique d'Asaf Avidan m'accompagne pendant ces longues heures d'inertie si propices à la rêverie et je bénis encore mes collègues de travail qui m'ont offert ce mp4 avant mon départ.
Finalement, le temps s'écoule, les kilomètres s'enchaînent et c'est en pleine effervescence que la capitale nous accueille. Moins de 20 jours avant Noël, la foule s'est emparée des centres commerciaux et des festivités se préparent dans les rues avoisinantes de notre logement. Le retour de la gare routière est un véritable parcours du combattant et le métro un défi physique pour se faufiler dans si peu d'espace avec son gros sac à dos. Mais en ce soir du 07 décembre nous voici donc revenus à notre point de départ.

Ces 2 jours sur la capitale nous permettent de prendre du repos et d'effectuer les démarches nécessaires à la suite de notre voyage.
L'île de Pâques est un rêve bien ancien....et malheureusement elle le restera. Le prix des billets est excessif ( 1000 euros / personne) et hors de notre budget. C'est donc le cœur gros que nous renonçons à aller admirer les Moais . Une étape de plus à mettre au placard des regrets et une raison de plus pour revenir sur ces terres lointaines.
Par contre, la chance nous sourit pour la réservation de notre croisière dans les fjords de Patagonie. Nous allons directement au bureau de la compagnie Navimag à Santiago. Là, nous sommes chaleureusement accueillis mais la catégorie de cabine désirée n'est plus disponible. Sans hésiter, l'employée nous propose un sur classement et pour le même prix nous voyagerons dans une cabine avec hublot et lavabo. Billet de bateau en main nous pouvons poursuivre notre descente et notre prochaine étape Pucon en Araucania se situe à plus de 700 kms de là .

10/12 – 17/12 : Pucon
La région de l'Araucania avec ses lacs, ses volcans, ses cascades, ses sources chaudes et ses parcs nationaux est propice à l'immersion en pleine nature et aux différents sports d'aventure. Notre point de chute, Pucon est situé sur les rives du lac Villarica avec en toile de fond le volcan du même nom au sommet enneigé. Ancienne villégiature huppée où de nombreux touristes viennent profiter des atouts de la région, nous ne désirons pas loger directement en ville et c'est à 4 kms de là que nous prenons nos quartiers.
C'est encore la basse saison et Solange la propriétaire de « los Gualles de la Candelaria » nous loge dans son plus grand appartement ( encore un sur classement). Le logement est très confortable, la cuisine parfaitement équipée et Solange une vraie mère pour nous.
 La maison en bois est entourée d'un jardin où fleurs et arbres s'épanouissent. Au dessus, une piscine extérieure offre, en cette saison, la possibilité d'un bain glacé et une jolie vue sur le lac d'où l'on peut admirer le coucher du soleil.
Nous nous sentons bien dans cet environnement et Susu la petite chienne des lieux assure merveilleusement son rôle de relation publique, . Seul bémol au tableau : la route qui nous sépare des berges du lac. Très fréquentée, elle distille un bruit constant . Mais installés à l'ombre des Hualles ( grand arbre à feuille caduc ) et entourés d'une végétation luxuriante, nous profitons un maximum du lieu intégrant inconsciemment cette rumeur urbaine.
Notre éloignement de la ville n'est pas un problème, des bus passent toutes les 15 mm et nous amène jusqu'à Pucon.
La ville est joliment et richement aménagée...Tout y est fait pour le tourisme : son petit port sur les rives du lac, ses plages, ses restaurants, bars, magasins d' articles de sport de luxe, hôtels, pensions, supermarchés ainsi que ses nombreuses agences de tourisme proposant une multitude d'activités sont là pour satisfaire un public hétéroclite. De la visite des sources chaudes à l'ascension du volcan en passant par du rafting sur les rivières environnantes, de l'équitation, du canyoning, etc.... ici tout est possible, la nature est un grand terrain de jeux.
L'offre d'hébergement est impressionnante en ville ainsi que tout le long du lac où complexes hôteliers et « cabanas » (maison de bois indépendante) attendent l'été et son afflux de touristes. Bien sûr, notre hébergement est plus cher qu'une simple chambre sur Pucon mais vu les prix excessifs des restaurants il est finalement plus économique de pouvoir se faire la cuisine. Et je retrouve avec plaisir les petits plats de Denis, les salades avec de savoureux avocats et nos premières fraises, myrtilles et framboises. Un délice dont nous nous régalons quotidiennement !

Que cette terre Mapuche est belle ! De climat tempéré, sa végétation en est moins exotique et les maison de bois, ses forêts pourraient nous faire penser à un petit coin d'Europe . Mais le bleu des lacs, l'eau cristalline des tumultueuses rivières, la silhouette imposante des volcans, les plages de sable noir, les coulées de lave recouvertes de son tapis végétal spécifique et bien sûr son arbre symbole l'Araucaria en font un territoire unique et riche.
Les mapuches, principal groupe ethnique indigène du Chili, combattent encore pour conserver ou retrouver ces terres que les envahisseurs successifs se sont appropriés tout au long de l'histoire. Malgré une reconnaissance juridique internationale, les mapuches sont toujours en résistance et victimes de violations des droits de l'homme.
A Pucon, nombre de chiliens affichent cependant un faciès, plutôt européen, même tendance germanique. Comme Solange, notre logeuse, au prénom français, beaucoup de locaux ont des ancêtres allemands. Au début du XX siècle, l'état chilien entame une politique de colonisation de cette région et cède des terres aux migrants d'origine germanique uniquement, donnant ainsi ce petit air de Bavière à la région. Grande femme blonde aux yeux bleus et aux taches de rousseur parlant en espagnol avec de grands gestes, Solange en est l'exemple type : un physique européen du nord au caractère latino bien trempé. Un peu déroutant au début mais cependant charmant pour nous simples voyageurs !


Nous avons donc une semaine pour explorer cette région aux multiples trésors et nous commençons par satisfaire notre envie de ballade équestre qui nous tenaille depuis un moment . Le temps et le paysage sont propices à ce genre d'activité.
C'est accompagnés de deux autres touristes allemandes et de nos deux guides que nous partons pour 4 heures de ballades à travers ces terres mapuches. Denis, seul homme de ce petit groupe est coiffé de son chapeau de Puno et affiche un grand sourire... Il est vrai que l'instant est magique … et malgré mes appréhensions de débutante je me laisse aussi gagner par ce simple bonheur . Sensation de paix et de liberté ! L' harmonie est totale, le moment privilégié, les paysages magnifiés.

Au pas, au trot et même au galop (bon ! j'avoue Peppers mon cheval ne m'a fait galoper qu'une seule fois et sur quelques mètres seulement, il est docile mais aussi très pépère!) nous suivons la rivière, traversant des prairies, grimpant des collines, entrant dans un labyrinthe de sous bois à la végétation et aux branches malicieuses, admirant volcans, lacs et forêts. La région n'est pas inhabitée et de nombreuses maisons de plain-pied en bois abritent les familles mapuches. Là bas, un chien mène un troupeau de moutons à son enclos ; ici deux chevaux galopent jusqu'à la clôture pour mieux nous voir ; un peu plus loin un petit rapace, peu farouche, s'amuse à nous regarder passer puis à nous devancer de nouveau.... Vous l'avez compris, un pur moment de bonheur sur ces terres où la nature, une fois de plus, fait preuve de génie. Un pays de légendes et de dieux dont les mapuches respectent, vénèrent et protègent chaque élément .
Pour une première fois, je ne pouvais rêver mieux et restent, malgré les douleurs des fessiers, un merveilleux souvenir, quelques photos et une grosse envie de renouveler l'expérience.




Nous louons quelques jours un véhicule pour être libre d'explorer les alentours et munis de la carte fournie par notre hôtesse nous partons vagabonder entre volcans et lacs à la recherche de cascades et sources chaudes.
Direction nord Est pour commencer avec le lago Caburgua et sa ravissante playa blanca dont la blancheur contraste avec le sable noir d'origine volcanique, si commun dans cette région. L' endroit est charmant et paisible. Le lac est entouré de montagnes avec au loin la silhouette imposante des volcans. Ses eaux calmes sont une invitation aux loisirs nautiques : canoë, pédalo et baignade occupent déjà les quelques touristes chiliens venus profiter des premières chaleurs de cette fin de printemps.

 Le village de Caburgua s'étale le long des rives mais s'agrippe aussi aux pentes environnantes. Ici le bois est le matériel privilégié pour toutes les constructions et même les églises n'échappent pas à la règle. Nous y admirons notre première église entièrement en bois....une première certes... mais pas la dernière dans notre périple au Sud Chili.
La forêt recouvrant les collines alentours abritent « cabanas » et terrains de camping encore désertés en cette saison mais le peu d'affluence donne à ces lieux plus de charme et de tranquillité. Nous nous laissons bercer par cette douceur de vivre et les petits plaisirs du moment profitant ainsi des trésors culinaires faits et vendus par les habitants le long de la route. La tarte aux framboises fait encore pétiller de gourmandise les yeux de Denis !





Avec notre vieille Fiat Uno rayée et cabossée, nous n'hésitons pas à explorer les environs et à emprunter routes secondaires et pistes . Pas d'angoisse de rajouter une bosse ou une rayure à notre carrosse de location … et bien vite nous comprenons l'état de notre véhicule !
Ici seules les grandes routes sont asphaltées, les autres étant, elles, recouvertes de gravillons. Panneaux de signalisation, arrêts de bus, habitations aux bord de la chaussée, traversées de villages, sorties d'école, important trafic...elles ont tout des grandes, seul le revêtement change. C'est, par conséquent, à une allure modérée, accompagnés du bruit des petits cailloux projetés et traînant derrière nous un nuage de poussière que nous partons pour les sources  « Géométricas ».
Ah la poussière ! Notre pire ennemie !
Suivre un véhicule est impossible, en croiser un relève du concours de rapidité dont l'enjeu est de remonter nos vitres avant l'arrivée du terrible nuage mais finalement ce petit défi nous amuse beaucoup..( eh oui nous sommes toujours de grands enfants!) Notre « titine » du moment a des allures de Lilliputien face aux 4x4, pick-up, camions et bus rencontrés mais avec force cahots et prudence, elle passe partout et nous permet d'accéder aux différentes cascades qui longent ce chemin.

C'est le hasard qui nous mène aux pieds de la première... Une simple pancarte manuscrite nous incite à s'échapper un instant de notre itinéraire et après quelques kilomètres nous stoppons devant une barrière . Là, deux ou trois maisons ainsi que bergeries et poulaillers occupent ce petit plateau verdoyant où la piste s’évanouit. Mais l'endroit semble désert et seuls coqs et moutons se préoccupent de notre présence.

 Mais bien vite une jeune femme sort de sa maison, encaisse un modique droit d'entrée et nous indique le chemin à suivre. Nous descendons un sentier menant à une petite gorge où les roches grises d'une ancienne coulée de lave se dressent entre nous et l'eau que l'on entend chanter un peu plus loin.Nous contournons ou grimpons sur ces rochers de lave... et des parcelles d'herbe grasse, des bosquets d'arbres et de résineux se laissent enfin entrevoir. L'eau est de partout, s'infiltrant entre les pierres pour trouver son passage, imbibant comme une éponge ces vertes prairies. Pour compléter le tableau, quelques vaches paissent tranquillement, levant de temps en temps la tête pour nous observer.
La cascade chute d'une cinquantaine mètres et donne naissance à un ruisseau qui serpente entre ces terres vallonnées. Accrochées à sa paroi, un tapis de mousse et d'immenses plantes prospèrent dans la bruine ambiante. Le contraste des couleurs est magnifié par l'eau, le végétal et le minéral. Le gris de la lave, le rouge du lit de la rivière et le vert intense des plantes et de l'herbe donnent l'impression d'une trop forte saturation rendant ce paysage presque irréel. Il y fait bon s'y attarder cependant et cette ambiance bucolique est à savourer avec tous ses sens : l'odeur de la terre humide, les couleurs , le bruit de l'eau et la douceur d'une prairie bien épaisse.

















C'est un style complètement différent qui nous attend quelques kilomètres plus loin. Ici la chute d'eau est le prétexte à la pratique du canyoning. Pas de vache, ni d'herbages mais une forêt aux arbres gigantesques menant à ses pieds et au petit pont d'où l'on peut pleinement l'admirer sans être complètement trempés. Là aussi un tapis de buissons et de plantes d'eau lui servent de chaussettes et la mousse tache par endroit cette paroi vertigineuse de 100 mètres. Avant de continuer notre route, nous contemplons un moment la descente en rappel de ce groupe de touristes venus ici prendre une bonne douche et une bonne dose d'adrénaline.




Un dernier arrêt , une dernière cascade ... et encore un merveilleux spectacle. Après quelques mètres sous le couvert de grands arbres, nous poursuivons à travers une végétation dense où l'eau règne en maître, s'infiltrant et s'écoulant de toutes parts. Un véritable petit paradis pour ces plantes géantes aussi hautes que moi et précautionneusement nous marchons sur les lattes de bois permettant de ne pas trop se mouiller les pieds. Nous sommes seuls et littéralement submergés par ce vert intense. Le bruit de l'eau s'intensifie avant même de pouvoir l'apercevoir.
Puis là, la rivière dégringole une première fois formant un bassin qui à son tour dévale la roche. Une double cascade ! Nous sommes gâtés. Un gros rocher chauffé par le soleil nous sert d'observatoire mais selon les vents, la bruine change de direction et nous voici soudain sous cette petite pluie fine rendant notre refuge glissant tandis qu'un arc en ciel s'amuse à cache cache autour de nous. Quelques clichés souvenirs et nous reprenons notre route vers les sources chaudes « géométricas ».















Le Chili compte environ 275 sources chaudes et la région de Pucon est l'endroit idéal et emblématique pour prendre un bon bain chaud relaxant. Sa multitude et sa variété de thermes rendent le choix difficile... mais finalement nous nous laissons tenter par « las termas geometricas ».


Niché dans un canyon étroit , des passerelles en bois rouges cheminent à travers la végétation exubérante entourant le cours d'eau qui passe sous nos pieds. 17 bassins d'ardoise disséminés tout le long de cette gorge se fondent dans la roche et le vert intense des plantes tandis que la vapeur émanant de ces piscines renforce l'ambiance zen des lieux. La température de l'eau varie entre 36 et 41 degrés et est inscrite sur un petit panneau près de chaque bain. Nous évitons le bassin d'eau froide et petit à petit nous nous prélassons dans les plus chauds. Un véritable plaisir, un instant de relaxation intense....Que du bonheur avec en prime les thermes pratiquement pour nous tous seuls. Entre deux plongeons nous déambulons dans ce dédale de roche et de végétal jusqu'à son extrémité et sa petite cascade. Le lieu est simplement magnifique et le soleil tirant sa révérence l'embellit de couleurs chaudes et rosées.
Superbement aménagés et entretenus, les thermes offrent, en plus, le confort d'un vestiaire avec cadenas et le prêt de serviette de bain. Un bâtiment de bois sert d'accueil et de bar restaurant. Ici tout n'est que luxe, calme et beauté....Seul bémol, le luxe se paye et le prix d'entrée est 2 à 3 fois supérieur aux autres mais aucun regret, « las geometricas » nous ont totalement séduit.





Douce errance dans ces territoires...!
Du Sud au Nord en passant par l'Est nous nous laissons dériver au grès de notre humeur, profitant un maximum de cette Nature.
Ici pas d'immeuble, ni de « plaza de armas » mais forêts, lacs, volcans et blancs nuages qui s'effilochent dans ce ciel si pur, lui donnant ainsi ce petit goût magique d'infini.
Mais la chanson se termine et... « Ainsi font, font, font... 3 petits tours et puis s'en vont... »

















Et c'est le cœur gros et rempli de regrets que nous quittons Pucon …. Une semaine a exploré cette superbe région....et tant de choses encore à y découvrir : ses parcs nationaux et sa végétation exceptionnelle, sa cuisine mapuche ainsi que ces géants de feu dont la silhouette imposante et leur activité marquent à jamais ce paysage grandiose.
Bref, notre placard aux regrets se remplit un peu plus... mais Noël approche à grands pas et nous avons prévu de passer les 8 prochains jours sur l'île de Chiloé.
Après avoir fait nos adieux à Solange et Susu, nous prenons le bus pour Valdivia, étape nécessaire pour rejoindre notre destination finale. Assis dans le bus, la gorge nouée d'abandonner cette petite famille d'adoption mais le sourire aux lèvres de bientôt fouler ces terres légendaires de Chiloé, nous regardons défiler les kilomètres qui nous mènent de plus en plus vers le Sud.... mais ça c'est une autre histoire.